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Thursday 18 July 2024 07:00

L'INVITÉ DE LA RÉDACTION


Dans les méandres des défis environnementaux, l'eau s'avère être l'un des piliers essentiels, trop souvent négligé, de notre écosystème. Pourtant, son importance ne saurait être surestimée, surtout dans des régions comme le Valais. C'est dans cette optique que nous avons le privilège de discuter avec Joël Di Natale, le directeur général du Groupe ALTIS, partenaire de la HES-SO Valais-Wallis dans la création de l’antenne de recherche Sustainable Technology REsearch in Aqua Management (STREAM) au BlueArk. 

 

Pourquoi est-ce important, selon vous, de reparler de la problématique de l’eau en Valais ?

Par où commencer : pluies diluviennes, laves torrentielles, sécheresses, pollutions, fuites dans les réseaux d’eau, irrigation des prairies, retour des concessions, partage de l’eau, etc. Tous ces sujets doivent être pris au sérieux et étudiés. L’électricité, tout le monde y réfléchit. L’eau, beaucoup moins.

Comment l’expliquez-vous ?

Un premier élément de réponse concerne la disponibilité de la ressource. Tant qu’il y a de l’eau en abondance, personne ne s’y intéresse. Or, pour l’instant en Valais, la situation est gérable, nous avons encore suffisamment d’eau à disposition. Mais si j’habitais à Barcelone, tout le monde en parlerait. Nous devons anticiper ces problèmes et ne pas nous retrouver dans la même situation qu’eux. Heureusement, la fondation The Ark et les communes de l’Entremont nous ont soutenus et c’est pourquoi le BlueArk existe.

Quels sont les enjeux principaux ?

Durant plusieurs mois par année, il n’y aura simplement plus assez d’eau pour satisfaire tout le monde. Il faut donc réfléchir et mettre en place une stratégie eau à 10 ans pour le canton. Pour l’instant, nous peinons à la mettre en œuvre, principalement pour des questions de gouvernance.

A court terme, il y a le défi de la rétention d’eau pour lequel nous nous impliquons avec ALTIS. Lorsque de fortes précipitations ont lieu, il faut pouvoir retenir cette eau pour la redistribuer plus tard, en construisant des bassins par exemple.

Et à long terme, il nous faudra modéliser les régions sous stress hydrique et préparer les générations futures à ces questions-là. Et ne vous y trompez pas, il y a urgence ! En 2060 – et peut-être même avant – une partie de notre canton sera sous stress hydrique. Pour être prêt, il faut mettre en place les outils adéquats dès maintenant.

Les solutions purement techniques suffiront-elles à résoudre les problèmes de disponibilité de l’eau ? 

Non, elles ne suffiront pas. Les mentalités doivent également évoluer. L’hiver dernier, il a fallu un dérèglement massif pour que les gens prennent conscience des enjeux électriques.  La situation sera similaire avec l’eau. Si nous ne faisons rien aujourd’hui, il faudra interdire demain. Barcelone n’a pas osé faire des restrictions lors de la période touristique et maintenant, c’est catastrophique.

Que peut-on apprendre de cette situation tragique ?

Je ne suis pas très optimiste, même si j’ai soutenu l’importance de la sobriété lors de la dernière BlueArk Conference. Ma mère m’a dit plein de fois de faire attention à ne pas me casser une jambe et j’ai compris en me cassant la jambe. La conscientisation va certainement passer par ce que j’appelle «la pénalité de douleur », soit des restrictions !

Dans 50 ans, comment aimeriez-vous que le Valais (ou le Val de Bagnes) utilise son eau ?

Tout d’abord, je suis fier de mes actionnaires et de la commune du Val de Bagnes qui essaient d’être exemplaires en imaginant notre vallée comme un laboratoire à ciel ouvert pour répondre aux défis de demain. Mais il est très difficile d’imaginer l’arc alpin en 2070, sans les glaciers et avec 4 degrés de plus. Grâce à ALTIS, au BlueArk et au STREAM, nous essayons de simuler des scenarii probables et développons des projets qui, espérons-le, pourront répondre à ces enjeux. Changeons le monde ici et maintenant, car chaque goutte d’eau compte.