Analyse de la situation par Stéphane Genoud au 6 octobre 2022

Pénurie d'énergie hiver 2022 - 2023

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Analyse de la situation par Stéphane Genoud au 06.10.2022

Au regard de l’évolution des différents indicateurs à notre disposition (voir graphiques et explications ci-dessous), et malgré certaines évolutions, nous pouvons estimer que le risque de pénurie pour cet hiver 2022-2023 est toujours assez marqué.

Nous attendons toujours des consignes très claires du Conseil Fédéral, concernant la mise en œuvre du plan OSTRAL. Cela est très préoccupant car ces précieux jours perdus maintenant risque de nous couter très cher demain. De plus, plusieurs milieux informés disent que cette tergiversation du CF est liée aux enjeux très important pour l’économie Suisse et ils ne voient pas le CF mettre en œuvre le chapitre 4 du plan (pénurie organisée) pour éviter le blackout. « Ils n’oseront pas appuyer sur le bouton au vu des enjeux… ». Sauf que nous espérons que nos autorités suprêmes seront à la hauteur de cette décision difficile, certes, mais ne pas agir au bon moment, augmente dangereusement le risque de plonger le pays dans le noir pour de trop (longs) jours.

Le CF à lancé un appel d’offres pour établir les réserves d’eau dans les barrages en Suisse. Mais, lors de la journée de l’énergie à la foire du Valais, Alpiq signale que les volumes d’eau pour l’hiver qui vient ont déjà toutes été vendues et que s’il devait répondre à cet appel d’offres, il allait devoir racheter de l’électricité sur les marchés. La solution imaginée par de CF risque donc de couter très cher. Avons-nous aujourd’hui compris ce que cette crise va nous couter ? Allons-nous prendre rapidement les mesures nécessaires pour produire ici, chez nous, la production d’électricité nécessaire à nos activités et avons-nous planifié toutes les mesures d’assainissement énergétique de notre pays ? Car nous savons bien que l’énergie la moins cher et la plus écologique est celle que nous ne consommons pas !

Retrouvez ci-dessous tous les indicateurs nous permettant d’analyser la situation actuelle :

Les indicateurs

1. L'électricité en Suisse

Prix d’électricité pour les 12 prochains mois

Nous ajoutons des données sur les prix futurs pour la Suisse. Comme vous le voyez, cela est fait pour la base, soit une consommation en ruban pour 24h. Ces prix montrent que l’hiver à venir est très cher, mais un peu moins que pour nos amis français. Le début d’hiver 23/24 est aussi encore très tendu, car les prix sont toujours hors normes, vers 500 €/MWh, soit 50 cts/kWh.

Source : energyscan.engie.com

Les imports net de la Suisse

Ce graphique montre les imports net moyen d’électricité en Suisse pour la période 2018-2021, ainsi que les imports pour l’année 2022.

Nous oscillons toujours entre les imports et les exports, ce qui correspond à une situation normale pour l’automne.

Source : energyscan.engie.com

La demande d’électricité en Suisse 

Pour le moment, les températures clémentes accompagnent les efforts que nous devons faire pour économiser l’électricité.

Le graphique suivant montre la moyenne des puissances de la consommation Suisse des années 2019 à 2022.

Source : energyscan.engie.com

La production d’électricité en Suisse 

La production nucléaire est proche des maximas des années précédentes tel qu’on peut le voir dans le graphique ci-dessous. Nous allons chercher à comprendre si l’arrêt de Mulheberg serait responsable de la différence de 10 GWh par rapport au maxima 2017-2021.

Ce graphique montre l'énergie produite par les réacteurs suisses pour les années 2017-2021 et pour l’année en cours.

Source : energyscan.engie.com

La production hydraulique au fil de l’eau est au niveau maximal des années précédentes.

Ce graphique montre le niveau de production des centrales hydrauliques au fil de l’eau en Suisse pour les années 2017-2021 et pour l’année en cours.

Source : energyscan.engie.com

La situation est quasiment identique pour la production hydraulique d’accumulation (barrages).

Ce graphique montre le niveau de production des centrales hydrauliques à accumulation en Suisse pour les années 2017-2021 et pour l’année en cours.

Source : energyscan.engie.com

On voit que les productions estivales sont plus base que d’habitude, cela vient des baisses de précipitations de cette été.

Pour prendre l’exemple de la Grande-Dixence, pendant l’été, le barrage ne peut pas accumuler les deux arrivées d’eau, c’est à dire la fonte des glaciers et les précipitations. Ils doivent donc turbiner une partie de l’eau pour éviter de la perdre par débordement. Cela explique donc la faible production de cet été.

Nous ferons un petit point la semaine prochaine sur le projet Gornerli, pour montrer en quoi ce projet permettrait de réduire le risque de pénurie pour…2030 ! si tout va bien.

Les supers profits des producteurs suisses sont très élevé

Source : energyscan.engie.com

Le Day-Ahead d’hier était à 218.49 €/MWh, soit 5x plus que le coût moyen de production nucléaire et 3x plus que les couts moyens de la production hydraulique à accumulation, si les ventes sont faite en suisse.

Réserve hydraulique pour la Suisse 

Ce graphique montre le niveau des barrages en Suisse sur les années 2020-2021 et l’état actuel des réserves pour l’année en cours.

Le niveau de nos réserves est toujours inférieur aux moyennes des 20 dernières années

Source : energyscan.engie.com

2. Pénurie : les signaux de la France

Les prix de l’électricité en France aujourd’hui

Ce tableau donne les prix du marché de l’électricité avec les prix français au 6 octobre, ainsi qu'au et 21 et 28 septembre (pour comparaison).

Toujours des très grandes volatilités sur les prix. Je vous rappelle que les prix des derniers jours dans le tableau sont influencés par les fondamentaux (gaz, REMIT,…) et les conditions météos très clémentes pour les 7 derniers jours. Par contre, pour les M+1 (mois prochain), Q+1 (trimestre prochain) et CAL+1 (année prochaine), les normales saisonnières expliquent évidement les variations de prix, mais pas la météo, car Météosuisse n’a pas de modèle de prévision météo pour dans 1 mois, 1 trimestre ou 1 an.

Source : energyscan.engie.com

La production et les imports net de la France

Pas de changement à ce niveau, tant que les réacteurs ne sont pas repartis en production, la France est toujours importateur net (courbe rouge), même si cela oscille un peu avec des exportations

Source : energyscan.engie.com

Puissance des réacteurs nucléaires français 

Toujours pas d’amélioration significative concernant la production nucléaire.

Ce graphique montre la puissance généré par les réacteurs français pour les années précédentes, l’année en cours et la prévision pour le reste de l’année. 

Etat au 31 mai 2022

Source : energyscan.engie.com

Etat au 6 octobre 2022

Source : energyscan.engie.com

Rien de neuf sous les étoiles…les informations de EDF ne sont toujours pas fiable.

Nous pouvons en effet remarquer que la courbe bleu, qui est la puissance théorique générée par les réacteurs français à leur reprise (interprétation réalisée à partir des indisponibilités des centrales nucléaires françaises annoncées par EDF), de la fin du mois de mai, ne correspond absolument pas à la courbe réelle (rouge) à début octobre.

C’est une estimation théorique de la puissance disponible dans les mois à venir, si ces réacteurs sont en mesure de redémarrer.

Ça me rappelle :

C’est dommage, car lorsque EDF annoncera vraiment une bonne nouvelle, nous ne les croisons probablement pas.

3. Pénurie : les signaux de l'Allemagne

Les prix de l’électricité en Allemagne aujourd’hui

Ce tableau donne les prix du marché de l’électricité avec les prix allemands au 29 septembre, ainsi qu'au et 6 et au 13 septembre (pour comparaison).

On voit que le marché allemand est moins tendu que celui de Français. La bonne nouvelle de la semaine prochaine se confirme cette semaine également : les prix pour l’année calendaire suivante (CAL+1) continuent de baisser.

Source : energyscan.engie.com

L’évolution des prix Day-Ahead montre une baisse le 2 octobre…magique, car c’est exactement le pic que production prévue par l’éolien allemand. On comprend donc le lien entre le prix de court terme et la production d’énergie renouvelable, donc de la météo que nous avions présenté la semaine passée.

Source : energyscan.engie.com

Exports de gaz russe vers l’Europe 

Les exports de gaz russe sont toujours à zéro et risquent de se prolonger vu les actes de sabotage sur les deux grandes pipelines (Nord Stream 1 & 2) qui viennent de Russie (voir article de TradeDirect). Mais, la bonne nouvelle est que, d’après les Russes, seul un pipe a subit une grosse casse. Donc si nous retrouvions une piste de discussion avec la Russie, il serait possible d’ouvrir le vanne pour la moitié du transfert possible avant le sabotage.

En attendant, les européens cherchent une piste pour réduire les prix sur le marché de l’électricité, c’est-à-dire en plafonnant les prix du gaz (voir dossier sur la péninsule hibérique). M. Macron, chevalier blanc de cette proposition, promet de convaincre les Européens d’accepter cela malgré un avis contraire des Allemands. L’Europe se penche aussi sur des mécanismes de financement solidaire comme identique à la situation « pour éviter qu’on ait un marché européen qui explose dans cette crise ». 

Ce graphique montre le niveau des exports de gaz de la Russie vers l’Europe sur les années 2016-2021 et l’état actuel des exports pour l’année en cours.

Source : energyscan.engie.com

4. Les réserves/stocks

Stocks de gaz en Europe 

Ce graphique montre le niveau des stocks de gaz en Europe sur les années 2015-2021 et l’état actuel des stocks pour l’année en cours.

Le taux de croissance relatif des stocks est toujours positif ce qui permet d’accroitre les réserves européennes.

Source : energyscan.engie.com

La tendance pour nos deux grands voisins (France et Allemagne) suit la même tendance.

Les importations européennes de gaz liquéfié (GNL)

On voit que les importations de GNL sont beaucoup plus hautes que les années précédentes, essentiellement en provenance des forages de schiste des USA. 

Source : energyscan.engie.com

5. Prévisions météorologiques

Nous ajoutons une rubrique sur la météorologie. On voit que les modèles de prévision sont bons.

La semaine à venir est plutôt très prometteuse pour la production d’électricité à base d’éolienne, comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous. Nous aurons donc probablement un prix à court terme sur le marché allemand en baisse pour la semaine du 6 au 21 octobre. On verra si cela se confirme…

Ce graphique montre la production éolienne pour l’Allemagne pour les semaines précédentes et les prévisions pour les 2 semaines à venir. On voit que le modèle de prévision est bien, et que le prochaine semaine le vent ne sera pas très élevé, avec un renforcement des conditions dès le 15 octobre.

Ce graphique montre la production éolienne pour l’Allemagne pour les semaines précédentes et les prévisions pour les 2 semaines à venir.

Source : energyscan.engie.com

…avec une corolaire solaire en baisse en fin de semaine.

Ce graphique montre la production photovoltaïque pour l’Allemagne pour les semaines précédentes et les prévisions pour les 2 semaines à venir.

Source : energyscan.engie.com

Pas de surprise, la température est en baisse. Elle est même un peu plus bas que les normes saisonnières.

Source : energyscan.engie.com

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