« Pourquoi les vieux ne restent-ils pas chez eux ? »
« De toute façon, les jeunes n’en font qu’à leur tête »
« Les politiques ne nous disent que ce qui les arrange »
« Il n’y a du fric que pour les grosses entreprises. Pour nous, rien »
Depuis le début de cette pandémie, tout le monde en prend pour son grade. Les plus vieux, les plus jeunes, les plus riches, les plus idiots, les plus brillants. A croire qu’avoir un profil qui sorte de la norme aimante les doigts accusateurs.
Alors pourquoi ? Pourquoi nous faut-il absolument chercher du réconfort dans l’identification de la différence, forcément plus coupable que nous ? La pandémie, dont les causes exactes ne seront peut-être jamais avérées avec certitude, ne peut pas apparaître sur le banc des accusés, car trop impalpable. On se rattrape donc sur les acteurs associés aux mesures liberticides que nous subissons avec toujours plus de peine : les vieux, les jeunes, les riches, les idiots, les savants. C’est forcément la faute de quelqu’un. Alors nous choisissons un groupe de personnes dont les critères conviennent et la mise au pilori commence. Je ne vous apprends rien, la ritournelle ne date pas d’hier. Le réflexe est humain et vieux comme le monde. Il soulage en gardant nos propres faiblesses à l’abri de la critique, et offre une explication à l’immobilisme et au désengagement de ceux-là même qui scandent avec ferveur le nom du condamné.
C’est pourquoi, plutôt que de céder à la réconfortante tentation de montrer l’autre du doigt, agissons collectivement afin de susciter l’engagement de chacun, comme cela s’est déjà vu à de nombreuses reprises dans notre école et ailleurs. Je pense aux 25 projets COVID bien sûr, mais aussi à la solidarité estudiantine envers les plus défavorisés, aux créations artistiques folles que cette période a fait germer, à la créativité dont ont fait preuve les enseignant·e·s et j’en passe. Un dysfonctionnement n’est pas quelque chose de 100% mauvais, car pour chaque raté il y a un retour d’expérience sur lequel il est judicieux de réfléchir afin d’aborder les prochaines épreuves avec davantage de responsabilité et de sagesse.
Ce magazine s’intéresse aux plus âgé·e·s d’entre nous. Ceux dont la voix porte moins loin. Face à la complexité des situations que la pandémie nous force à affronter, face à la résignation, au ras-le-bol et à la solitude, peut-être la sagesse et l’expérience des ancien·ne·s – trop souvent oubliée – pourra-t-elle nous inspirer ? Comme disait ma grand-mère : « Ce ne sont pas les difficultés du chemin qui te font mal au pied, c’est le caillou qui est dans ta chaussure ».
Bonne lecture !
Julien Robyr, rédacteur en chef