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© HES-SO Valais-Wallis, Laurent Darbellay, from left to right: Prof. Dr. Marc Mathieu, Peptide Laboratory (TEVI), Prof. Dr. Samuel Rey-Mermet, Powder Laboratory (ISI), Prof. Dr. Bruno Schynder, Microbiology Laboratory (TEVI).
Monday 26 June 2023 08:00

L’Axe Santé est un centre interdisciplinaire pour le développement de technologies de santé durables qui réunit l’ensemble des instituts de recherche de la HES-SO Valais Wallis. Nous avons rencontré Marc Mathieu, Professeur à l’Institut Technologies du vivant pour parler d’un projet soutenu par l’Axe Santé sur lequel il a travaillé avec deux collègues du Campus Enerypolis plusieurs mois : ALPICAT, soit le développement de prototypes de ferrules de cathéter dont la surface est enrobée de molécules antimicrobiennes.

La stérilisation des outils médicaux, une gageure

Il n’est pas rare d’entendre dans la presse que certaines bactéries sont résistantes aux antibiotiques. Les bactéries sont nécessaires à la vie, mais posent de nombreux problèmes de résistance, notamment en milieu médical ou hospitalier. Ces pathogènes peuvent être transmis à un être humain via le matériel médical par exemple. Ainsi, il est primordial de pouvoir assurer la stérilisation des outils chirurgicaux ou du matériel médical en toutes situations. Cela est plus simple à faire dans un laboratoire qui dispose d’un autoclave (récipient hermétique qui permet la stérilisation) mais peut s’avérer compliqué dans un cabinet médical situé dans une vallée alpine et qui n’aurait pas accès à ce type de machine ou plus particulièrement lors d’une intervention sur le terrain. De plus, cette manière de stériliser reste coûteuse, gourmande en temps, en énergie et en espace et pose d’ailleurs un problème de durabilité lorsque le matériel médical est à usage unique. Finalement, l’industrie pharmaceutique propose de nombreux antimicrobiens sous différentes formulations ou des désinfectants de surfaces qui ont leurs limites avec les souches bactériennes résistantes. Les Professeurs Marc Mathieu, Bruno Schnyder et Samuel Rey-Mermet souhaitent donc proposer aux professionnel-les de la santé des technologies portables et réutilisables grâce à des peptides antibactériens aux propriétés uniques.

Les peptides antibactériens au service de la médecine

Les peptides sont des séquences d’acides aminés et cette famille de molécules fait partie de la classe de composés appelés polymères. Ces séquences d’acides aminés existent sous forme naturelle, mais peuvent aussi être synthétisées en laboratoire. Depuis de nombreuses années, la recherche dans le domaine de la chimie s’est penchée sur les propriétés de ces molécules et l'on sait que certains peptides sont antimicrobiens, d’autres antioxydants ou qu’ils peuvent également soutenir le système immunitaire. Leurs molécules hautement actives aux propriétés permettant la stérilisation de surfaces à géométrie complexe sont à grande valeur ajoutée du fait de leurs propriétés innovantes et donc destinées à désinfecter des surfaces restreintes. Ainsi, le projet ALPICAT propose de fournir une technologie pour la stérilisation d’outils ou de composants pour la chirurgie dont les surfaces sont préalablement mises en contact dans une solution de peptides aux propriétés antibactériennes. Toutefois, la difficulté de cet objet de recherche consiste à rendre les peptides stables, car les molécules naturelles sont vulnérables et ont une durée de survie plutôt courte. Dès lors, il faut développer la bonne combinaison pour assurer une efficacité prolongée de l’effet des peptides et la manière de les combiner entre elles et de les greffer à la surface choisie.

Un projet inter-instituts pour tester les hypothèses

C’est ainsi que Marc Mathieu, responsable de la plateforme des peptides synthétiques et leurs mimétiques a orienté son projet de recherche soutenu par l’Axe Santé vers la stérilisation de cathéters médicaux imprimés en 3D par un bain de peptides antibactériens. Il s’avère que Samuel Rey-Mermet, chercheur en systèmes industriels et Bruno Schnyder, chercheur en microbiologie au sein de l’institut technologie du vivant font également partie de cette équipe pluridisciplinaire. Ainsi, les pièces conçues et imprimées par les équipes des systèmes industriels, ont été traitées avec les peptides conçus par Marc Mathieu et leurs propriétés antimicrobiennes testées par l’équipe de Bruno Schnyder. Les expériences démontrent la possibilité de stériliser des connecteurs, des ferrules ou encore des cathéters grâce à ces composés ou encore de créer des ferrules complexes réutilisables qui désinfectent les liquides sans passer par l’appareillage spécialisé et coûteux d’un laboratoire. Marc Mathieu précise qu’il est difficile de stériliser certains outils chirurgicaux, car leur forme est parfois très complexe ou que leur porosité laisse des niches à bactéries compliquées à stériliser. Le traitement par des peptides antibactériens greffés pourrait être une solution efficace, accessible et durable à cette problématique, car il permet un enrobage antibactérien complet de surfaces poreuses et complexes.

Marc Mathieu, la chimie au service de la santé humaine

Depuis 12 ans, le Professeur Marc Mathieu travaille à la HES-SO Valais-Wallis en tant qu’enseignant et chercheur. Depuis maintenant 30 ans, il s’intéresse aux biomolécules et aux peptides en particulier et y a consacré sa thèse puis son postdoctorat ainsi qu’une partie de sa carrière dans l’industrie et ses projets de recherche à la HES-SO Valais-Wallis. Il a notamment œuvré dans le domaine des anticancéreux avec des partenaires industriels, des start-ups ou des PME. Il a toujours souhaité mettre au service de la santé ses compétences dans le domaine passionnant de la chimie bio-organique, car il est conscient de l’immense potentiel de ces peptides qui pourraient servir à traiter de nombreuses problématiques de santé publique.

Photo : crédits © HES-SO Valais-Wallis, Laurent Darbellay. De gauche à droite : Prof. Dr. Marc Mathieu, Laboratoire des peptides (TEVI), Prof. Dr. Samuel Rey-Mermet, laboratoire des poudres (ISI), Prof. Dr. Bruno Schynder, Laboratoire de microbiologie (TEVI).